Nous passons à peu près un tiers de notre vie à dormir et pourtant le sommeil se trouve bien souvent malmené de nos jours. Cette belle mécanique subit l’évolution de nos modes et de nos rythmes de vie, à une époque où le principe d’immédiateté et d’accélération nous propulse toujours plus loin et plus vite.

Toutefois, le corps a ses limites et le stress chronique représente l’une des manifestations de cette pression qui s’infiltre couramment dans notre quotidien. Il agit directement sur notre sommeil avec des difficultés d’endormissement et/ou des éveils nocturnes et surtout précoces. 

De plus, le manque de sommeil est un activateur de stress : je dors mal, je suis plus facilement stressé, je supporte moins bien les contrariétés, les contraintes, mon stress augmente… et si je suis stressé, j’ai des troubles du sommeil, voire des insomnies. C’est un véritable cercle vicieux !

Il est d’ailleurs connu que le stress est l’une des premières causes d’insomnie occasionnelle, dite encore réactionnelle ou psychogène.

Mais attention, le stress n’est pas négatif en soi : c’est une réaction selon le syndrome d’adaptation. Face à une situation perçue comme menaçante toute une réaction physiologique va préparer le corps à y répondre. Certaines fonctions, comme le rythme cardiaque, vont s’accélérer, ainsi que la sécrétion de certaines hormones (adrénaline, cortisol).

Un stress répétitif ou qui perdure, peut provoquer une sorte d’emballement qui va beaucoup solliciter l’organisme : il risque alors de puiser dans ses réserves. Avec le temps, le corps s’épuise, le système immunitaire s’affaiblit et toute une cohorte de troubles peut apparaitre, renforcée par le manque de sommeil.

Dans le cadre professionnel, on parle de stress au travail quand une personne ressent un déséquilibre entre ce qu’on lui demande de faire et les ressources dont elle dispose pour y répondre.

Quoi qu’il en soit, si les origines du stress chronique sont multifactorielles, il impacte fréquemment le sommeil donc la santé et a souvent des répercussions sur le travail avec :

  • Augmentation du stress (le stress s’auto-entretient !)
  • Démotivation
  • Baisse de la vigilance et somnolence
  • Risque d’erreurs, difficulté décisionnelle
  • Absentéisme, présentéisme
  • Accidents du travail
  • Accidents de la route
  • Insomnie réactionnelle

Il s’avère donc important d’évacuer le stress pour préserver son sommeil.

 

Sommeil et diététique

Notre horloge biologique orchestre de nombreux rythmes dont la production de l’hormone de la satiété, la leptine, en plus grande quantité la nuit, et l’hormone de la faim, la ghréline, en journée. Nous sommes tout simplement génétiquement programmés pour manger le jour et faire le« jeûne » la nuit !

Les repas sont des donneurs de temps qui vont induire une rythmicité et aider la mémoire corporelle à repérer ces moments clés. Le diner,  3ème repas de la journée, va ainsi annoncer l’approche de la période d’endormissement. Et bien entendu le contenu de l’assiette influe sur la qualité du sommeil.

Là, plus que jamais, il est question d’équilibre, dans la composition, la quantité et les quelques entraves aux bonne règles…

De manière générale, voici les recommandations préconisées :

  • Respecter les 3 repas par jour à des horaires réguliers
  • Diner si possible au moins 2 heures avant le coucher, pour ne pas perturber la digestion. Le travail de digestion fait augmenter la température interne, signe d’éveil
  • Les sucres sont inducteurs de sommeil donc choisir des glucides avant le coucher. Si les pâtes, riz et autres céréales sont donc à privilégier, préférez-les complètes ou semi-complètes, en quantité raisonnable pour ne pas alourdir la digestion ? Les fruits, de préférence en dehors du repas (sauf pour les personnes diabétiques), des légumes au choix, et les aliments riches en tryptophane* pour faciliter le sommeil
  • Eviter de manger des protéines le soir comme de la viande, qui va fournir de l’énergie, propice à l’éveil
  • Privilégier un repas léger et peu alcoolisé. L’alcool déstructure le sommeil et favorise le ronflement
  • Une tisane** ou boisson chaude est conseillée : elle va favoriser une baisse de la température interne par un mécanisme d’échange thermique, signal favorable au sommeil
  • Éviter le café dans les 5 à 6 heures avant le coucher car il a une demi  vie 4 à 6 heures après l’avoir bu. Il donne un sommeil lent léger plus important.  Le Robusta est plus fort que l’Arabica (2 fois plus de caféine)
  • Thé, cola, alcool, tabac, vitamine C, boisson énergisante etc : tous les excitants pris à l’approche du coucher peuvent contrarier la venue du sommeil

A savoir : ne pas dormir stimule l’appétit, augmente le grignotage et favorise la prise de poids !

*Le tryptophane est un acide aminé présent dans presque toutes les protéines alimentaires et permet au cerveau de fabriquer la sérotonine, indispensable à la sécrétion de la mélatonine, l’hormone du sommeil. On le trouve dans les légumes secs, les bananes, le chocolat noir, les noix de cajou…

**La valériane, la passiflore, la verveine ou la fleur d’aubépines possèdent des propriétés relaxantes, surtout si elles proviennent d’un herboriste !

 

Sommeil et écrans

Nous aurions perdu plus d’une heure de sommeil par jour au cours de ces 50 dernières années ! Nos modes de vie contribuent largement à cette évolution, à commencer par la venue de l’électricité en 1879. Dès lors, notre monde moderne a bousculé l’équilibre jour/nuit.

Le simple fait de pouvoir allumer une lampe grâce à l’électricité incite à poursuivre ses activités d’ordre tant personnelles que professionnelles dont le travail de nuit qui concerne aujourd’hui 1 salarié sur 4. Ce phénomène a été amplifié avec la venue de la télévision dans les années 1960, d’autant plus fortement que les programmes ont ensuite été diffusés de plus en plus tard dans la nuit. Et puis les nouvelles technologies, comme les DVD, l’enregistrement en direct, ont incité les téléspectateurs à retarder davantage encore l’heure du coucher.

Mais la seconde révolution, après l’électricité, est sans doute l’arrivée d’internet dans nos foyers vers 1994. Non seulement la télévision n’a plus le monopole des “couche-tard” mais, l’accès à toutes sortes d’informations incite à veiller en oubliant les besoins du corps. Et, l’évolution des nouvelles technologies ne fait que confirmer un constat : nous négligeons notre sommeil.

Et que dire de la dernière révolution en date, vers 2007, avec l’arrivée du  smartphone : le “doudou” technologique qui vous accompagne partout, en toute situation et bien entendu au lit…

En résumé, télévisions, téléphones, ordinateurs portables, tablettes, liseuses, etc. entrainent une hyperconnexion et une hyperstimulation de notre cerveau, ayant ainsi un impact direct sur notre sommeil.

Plusieurs raisons à cela :

  • Notre horloge biologique qui gouverne entre autre nos rythmes veille/sommeil, se synchronise sur 24h avec les rythmes sociaux (heure de lever et de coucher, repas, activités)  et avec la lumière. Effectivement, la lumière et surtout la lumière bleue des écrans, retarde la production de la mélatonine, l’hormone du sommeil. D’où, malgré la fatigue, des difficultés d’endormissement, voire de maintien de l’éveil.
  • Une conséquence très souvent observée, tout particulièrement chez les adolescents et les jeunes adultes : une désynchronisation avec des retards de phase. En d’autre termes, l’horloge se décale et le corps va prendre l’habitude de manifester son besoin de repos nocturne très tardivement, à partir d’une heure du matin par exemple, et d’engager un éveil naturel plus tardif*. Ce décalage représente une réaction physiologique naturelle chez l’adolescent mais renforcé par les connexions sur internet ou l’utilisation d’un smartphone à des heures tardives. D’où un éveil difficile le matin, voire très difficile !
  • La pression du sommeil se trouve contrariée par l’état d’hypervigilance occasionné par ces stimulations permanentes, ce qui entraine des difficultés d’endormissement, et de manière concomitante, le stress de ne pas trouver le sommeil
  • Le piège du dernier regard : ce petit coup d’œil pour vérifier si je n’ai pas reçu un SMS ou une alerte sur un des nombreux réseaux sociaux, pour rechercher une information pour le lendemain (même si cela peut attendre), bref, se trouver accaparé par cette lumière bleue si nuisible au sommeil. Habitude, réflexe, tendance addictive (surtout pour les jeux en ligne) : à chacun de veiller à limiter l’usage des nouvelles technologies de l’information et de la communication (NTIC) en soirée avec leur caractère chronophage, pour préserver le  bien-être du corps et son mental et passer une bonne nuit.  Et donc, vivre au mieux la journée qui suit.

Quoi qu’il en soit, les nouvelles technologies impactent nos modes de vie et touchent toutes les générations, de sorte que nous pouvons parler de véritable “jetlag social “.

* A noter qu’un éveil tardif sera moins récupérateur : environnement plus bruyant, augmentation de la température, davantage de clarté…

 

Sommeil et hygiène de vie : avoir une bonne hygiène du sommeil

En cours de journée :

  • Bouger, s’activer, va augmenter la “pression du sommeil”, ce besoin de dormir le soir venu, et le corps cherchera le temps de récupération plus facilement. 
  • Sortir à la pause déjeuner pour capter la lumière naturelle, plus forte en début d’après-midi (même à travers une couche nuageuse), pour favoriser l’éveil.
  • Pratiquer une activité physique. Ses avantages :

– Facilité d’endormissement
– Eveils nocturnes moins fréquents
– Rythmes du sommeil plus réguliers
– Augmentation de la durée de sommeil
– Meilleure vigilance diurne

  • Veiller à son équilibre alimentaire : ce que vous mangez favorise l’endormissement ou l’éveil !
  • Faire des pauses, se détendre pour bien gérer son énergie tout au long de la journée et évacuer le stress. Au besoin, s’octroyer une sieste.

En soirée :

  • Eviter toute lumière vive au moins 1h avant le coucher et en particulier les écrans à lumière bleue qui bloquent la production de la mélatonine, l’hormone du sommeil
  • Arrêter, de préférence 2 heures avant le coucher, toute activité physique d’intensité modérée à soutenue
  • Créer son rite du coucher pour envoyer des messages que le corps va mémoriser, afin de le préparer à l’endormissement
  • Répondre aux  premiers signes de fatigue pour bien prendre le train du sommeil lorsqu’il est en gare ! Ne pas se laisser “piéger” par le bon film ou le livre captivant…
  • Respecter votre chronotype, c’est à dire savoir si vous êtes plutôt un “caractère matin” ou un “caractère soir”. Dans le premier cas, il sera préférable d’aller vous coucher tôt le soir puisque vous vous réveillerez de bonne heure. Si vous êtes un “caractère soir”, rien ne sert d’aller au lit avec votre conjoint “couche tôt” ! Vous ne vous endormirez pas avant votre heure ! De même, si le votre programmation génétique est “long dormeur”, prévoyez un temps de sommeil suffisant pour récupérer.
  • Avoir des horaires réguliers, week-end inclus, pour bien régler votre horloge biologique. C’est elle qui gouverne vos rythmes et en particulier le rythme veille/sommeil
  • Privilégier un environnement propice au sommeil :

– Supprimer les écrans de la chambre (ordinateur, télévision, smartphone…) ; amener l’obscurité complète au moment de dormir
– Avoir une pièce bien aérée, avec une température autour des 18/20° si possible
– Eviter les sources de bruit : dormir dans un environnement bruyant est moins réparateur
– La qualité de la literie est un facteur important pour un bon sommeil : pensez à en changer tous les 10 ans environ
– La chambre est un lieu pour dormir. Il est donc fortement conseillé de ne pas manger dans son lit, d’y travailler ou d’y chater…

 

Les siestes

En dehors du week-end, la sieste n’a pas sa place dans notre culture. Elle est pourtant institutionnalisée en Chine et certaines entreprises japonaises n’hésitent pas à encourager leurs salariés à la pratiquer sur le lieu de travail. On pourrait s’en étonner excepté si l’on tient compte des besoins du corps.

Effectivement, nous sommes tous soumis à une courbe de la vigilance, c’est à dire que nous vivons des pics de vigilance, où nous sentons un regain d’énergie, en particulier autour des 10h puis autour des 17h. A l’opposé, notre organisme réclame un repos tout spécialement à deux moments clés :

  • Celui que nous repérons bien, en général après 21h, et qui annonce la nuit de sommeil.
  • Et puis entre 13h et 15h. Dans ce créneau, nous sommes nombreux à lutter contre un besoin de fermer les yeux, de se poser quelques instants. C’est normal, il s’agit d’une” porte du sommeil”, plus marquée si le repas a été copieux, mais que nous subissons tous. Effectivement, le corps manifeste le besoin de faire une pause.

Ces manifestations sont plus ou moins sensibles selon l’activité de la journée. Quoi qu’il en soit, le corps cherche toujours à revenir à l’équilibre grâce à des processus de régulation interne, c’est l’homéostasie : si j’ai été très actif, si la fatigue physique et/ou intellectuelle/émotionnelle est importante, alors le besoin de sommeil se fera plus pressant.

De fait, le plus souvent nous ne nous accordons pas cette pause et nous luttons pour rester éveillés, alors qu’il serait plus judicieux de s’octroyer une petite sieste pour s’économiser et « mieux vivre » le reste de la journée.

Il existe plusieurs types de siestes :

  • la sieste flash : d’une durée d’1 à 5 mn, elle suffit à relancer l’énergie toutefois ce n’est pas un vrai sommeil (puisque l’on n’entre pas dans un cycle de sommeil à proprement parlé).
  • la micro-sieste ou sieste parking : recommandée par la sécurité routière lorsque vous prenez la route, elle s’effectue sur moins de 20/30 mn (pas plus pour ne pas rentrer dans un cycle du sommeil) ; la personne reste en sommeil léger
  • la sieste méridionale, dite royale : pas plus d’un cycle de sommeil, soit en moyenne 1h30 ; elle est conseillée en cas de manque de sommeil ; attention à ce qu’elle n’empiète pas sur votre nuit de sommeil !

 

Les bienfaits de la sieste

Quelques minutes suffisent à certaines personnes pour récupérer. C’est à chacun de connaître son rythme de sommeil pour savoir quelle durée de sieste lui sera bénéfique.

Quoi qu’il en soit, la sieste favorise une récupération musculaire, une baisse de la dopamine et du cortisol (l’hormone du stress). Elle va avoir pour effet un accroissement de la vigilance, de la mémorisation et de la concentration. Elle permet aussi de récupérer d’une dette de sommeil. Il est important de la positionner de préférence en milieu de journée.

A savoir : une sieste d’une heure risque de provoquer un réveil désagréable : c’est normal. Un bon réveil intervient à la fin d’un cycle complet.

 

 

Références

Sources


Rédaction

  • L’équipe Offre Prévention de la Mutualité Française
  • Christine Ramonnet, sophrologue